Dans une contribution au débat sur Démographie et catégories " ethniques ", François Héran fait état d’une enquête de l’INED " conçue en 1986 sous l’égide de Le Bras " et d’un article de 1987 publié dans Population. Etant la réalisatrice de l’enquête et l’auteur de l’article auxquels il fait allusion, j’en assume l’entière responsabilité.
Afin d’engager un débat serein sur ce thème, je tiens à faire quelques rappels élémentaires. Quand on met en cause une enquête ou un article :
L’enquête " Peuplement et dépeuplement de Paris " s’inscrit dans la lignée de plusieurs enquêtes, en particulier l’enquête " Peuplement de Paris " réalisée par Guy Pourcher en 1961. Ce chercheur s’intéressait déjà aux origines géographiques des Parisiens (lieu de naissance de l’intéressé et de son conjoint, lieux de naissance des parents).
L’article, évoqué par F. Héran, fait effectivement référence aux " Parisiens de souche " avec la question d’opinion suivante : " D’une façon générale diriez-vous que vous êtes : Parisien de souche, Parisien de longue date, Parisien depuis peu, pas vraiment Parisien, autre... ? Il s’agit donc d’une autodéclaration et non pas d’une catégorie scientifique établie à partir du lieu de naissance de l’enquêté et de ses parents. D’ailleurs, dans l’exploitation de l’enquête, les " Parisiens de souche " sont regroupés avec les " Parisiens de longue date " sous la modalité " se considèrent comme parisiens " .
L’article ne parle pas " indifféremment d’intégration et d’assimilation " comme l’écrit François Héran, mais souligne qu’une seule question ne suffit pas pour comprendre la formation de la population parisienne : " c’est au terme d’entretiens non directifs et de récits de vie que l’on peut appréhender le phénomène complexe de l’intégration ". L’accent est mis sur les processus et la durée de résidence dans la région parisienne. L’analyse des trajectoires résidentielles menées depuis plusieurs années confirme l’importance des processus à l’œuvre. Les lieux où l’on a passé son enfance et son adolescence (c’est-à-dire les lieux de la socialisation) sont aussi importants que le lieu de naissance. Dans toutes ces analyses, l’individu est saisi à partir de ses localisations successives, de son espace de vie et non pas à partir d’une appartenance à un groupe qui serait déterminé par le lieu de naissance.
Ceci dit, la question du lieu de naissance mérite d’être posée. Mais pour avancer dans le débat, il ne sert à rien de provoquer de fausses querelles.
Catherine Bonvalet
Directrice de recherche
à l’INED